LE MET Y EST
Un stage clinique est toujours extraordinaire. Nous y sommes rodés depuis plus de 27 ans maintenant et pourtant chaque stage est une nouveauté, un défi, une adaptation parfois sensible dont il faut constamment ressentir le mouvement comme le doigt du violoniste qui trille sa note afin de l’avoir la plus juste.
Il faut gérer les patients. C’est notre priorité. Ils viennent ici pour être écoutés et soulagés de maux souvent très lourds qu’ils nous faut résoudre (dissoudre comme le sucre dans de l’eau). Leurs mots expriment souvent leur maux, comme par exemple cette patiente qui ne peut faire une phrase sans dire « du coup ». Il est évident qu’il faudra travailler sur son cou car des points sont actifs et demandent au travers de son vocabulaire inconscient à être piqués.
Mais aussi cette autre personne, dont un deuil entache sa vie. Ou encore celui-ci qui souffre du dos terriblement et encore celle-ci avec un goître et ce patient avec un lymphoedème. C’est là que le métier s’apprend. L’approche du patient, savoir lui parler et le réconforter, savoir questionner sans être invasif, savoir être en parfaite adaptation avec son patient et lui donner ce que tout être humain a besoin d’avoir: de l’amour. Nous disons souvent en cours, qu’il faut parler au Chen du patient. Cela signifie que celui-ci repartira plus fort, plus en confiance qu’il n’est entré. Il doit avoir « gagner » quelque chose de subtil et jamais avoir une sensation de perte. L’apprentissage est fondamental. Les mains des professeurs guident les mains de l’apprenti. L’aiguille est plantée selon des normes précises et immuables. Les geste du jeune émule sont les mêmes que des milliers de prédécesseurs avant lui. Il devient un chainon de cette tradition. Le questionnaire se perfectionne à chaque stage. Les pouls, d’inconnus deviennent des « déjà vus » encore vagues puis les années passant, le toucher s’affine et le nombre de pouls connus croît, assurant un bilan énergétique fiable et sûr. Les ventouses, les marteaux, les outils traditionnels prennent sens et le geste se fait plus sûr. La main suit l’esprit et celui-ci se cale sur le rythme du patient. Dans toute cette agitation il y a un point de stabilité, de silence, d’un autre espace-temps.
Mais il faut gérer aussi les élèves. Ceux-ci se découvrent petit-à-petit en explorant les patients par effet miroir, par transfert, par empathie. Cela bien évidemment a un prix; celui de se poser de vraies questions sur le sens de sa vie. Il faut alors craquer, laisser s’envoler des pensées cristallisées en nous qui nous empêchaient d’avancer sereinement. Naître c’est mourir un peu chaque jour mais c’est aussi s’alléger de nos scories, de nos noirceurs, de nos illusions illusoires. Et pour les professeurs, c’est une vrai joie que de vois nos élèves s’épanouir, tels des bourgeons qui éclosent laissant apparaître des fleurs exquises aux couleurs et odeurs éclatantes.
Et tout cela au travers du groupe. Ah le groupe! Il est un vrai rouleau compresseur. Il faut apprendre à vivre avec l’autre, confiné parfois mais acceptant cet autre qui n’est pas comme nous. Alors, en catimini, la plus grande transmission très ésotérique car non verbalisée prend sens au travers de la TOLERANCE. Un thérapeute apprend la technique, l’art dE l’acupuncture. Mais pour qu’il puisse réaliser pleinement sa toile, son oeuvre il doit devenir tolérant et comprendre en fin de compte qu’il n’y a pas de vérité mais uniquement des êtres en mouvement désireux de se parfaire et d’avancer vers cette liberté intérieure ultime étape avant la grande initiation de la vie.
A tous les stagiaires, à tous les patients, à tout le personnel des Terrasses à Wagenbourg qui nous ont reçu comme des amis, un mot suffit: MERCI ET HOPLA
Bon Vent
J.Motte
Comments