L’Organisation mondiale de la Santé définit la santé comme « un état de complet bien-être physique, mental et social, [qui] ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité ».
Je vous propose une incursion dans la pensée chinoise, un saut aussi bien temporel (puisque nous allons nous référer à des textes de plus de 2500 ans) que spatial (la Chine étant à 10000 km de Paris).
De tous temps, les hommes se sont posés la question fondamentale de savoir comment entretenir leur santé. La maladie étant dans ce cas la manifestation d’une défaillance soit de vie, soit alimentaire, soit encore émotionnelle.
Pour les orientaux, en général, vivre bien, c’est être ici et maintenant tant physique que spirituel, et cela se nomme l’éternité. Etre éternel donc, c’est être pleinement présent de l’instant et dans l’instant. Les deux particules « de » et « dans » nous ouvrent à une réflexion.
- Présent de l’instant, c’est accepter que le temps s’écoule, que nous sommes mortels, et comme l’écrit très bien Anne Osmont: « vivre, c’est mourir un peu chaque jour ». Le temps n’est pas un ennemi tel qu’on veut nous le faire entrevoir aujourd’hui. Le temps est ontologique à l’homme, il marque ses actions entre le passé et le futur. Le présent est ce moment étrange car insaisissable où nous ne devons pas avoir de crédit dans le passé, ce qui crée des angoisses, ni de projections dans le futur qui nous apportent de l’anxiété. Au Japon et particulièrement dans les arts, chaque chose doit être faite comme si c’était l’unique et dernière fois qu’elle fût faite. Cet état d’esprit porte à une paix intérieure et surtout ne nous condamne pas à sans cesse nous demander, si nous aurions pu mieux faire. C’est une question sans valeur qui nous fragilise et n’apporte que des pensées noires.
- Présent dans l’instant c’est comprendre que nous sommes le temps. Le temps est en nous. Les télomères qui retranscrivent nos brins d’ADN, prennent de l’énergie et sont à l’origine de notre vieillissement. Nos cellules intestinales suivent un cycle de vie et de mort. Tout ce qui compose notre corps naît vit et meurt. Le temps est donc en nous et nous constitue. L’être humain est une manifestation incarnée du temps. L’homme est un vivant mortel. La vie est une succession de naissances et de morts. La Nature, notre seul maître en tout, nous le montre bien. Les saisons sont des jalons temporels que les grecs nomment le Aïon pour le distinguer des deux autres formes de temps que sont Kairos, le temps de la synchronicité et Chronos, le temps qui passe.
Voilà donc les premières bases données par les anciens. Vivre ici et maintenant et le vivre pleinement. C’est un pari audacieux aujourd’hui car il faut bien l’admettre, les sociétés se développent en tentant de plus en plus d’occuper le temps en le fragmentant de plus en plus. Il faut donc accepter de ralentir, d’aller à son rythme et de ne pas céder à l’emballement général. Telle la tortue contre Achille, il suffit de partir au bon moment pour ne jamais être rattrapée.
Il se trouve qu’il y a un autre point très important qui peut nous rendre malade. Celui des désirs. Je crois bon de faire appel à Schopenhauer pour bien saisir le concept avancé. Je cite: « la vie est comme le balancier d’une pendule; lorsque je n’ai pas quelque chose, je le désire mais une fois que je l’ai, je m’ennuie ». Ainsi nous sommes contraints de vivre en permanence cette alternance de désir et d’ennui. Nous ne sommes pas loin de la condamnation de Sisyphe qui doit pousser sa pierre en haut d’une montagne pour la voir retomber l’instant d’après.
Ainsi nos désirs nous blessent et en acupuncture, ou du moins dans la pensée du Taoïsme, ces désirs inassouvis lèsent le coeur (énergie) et nous rendent aigris, envieux (en vieux). Cette joie qui doit s’exprimer sur notre visage par un sourire, devient un rictus de mépris. Notre âme est alors blessée. Il faut donc se satisfaire de ce que nous avons. Encore une fois, facile à dire, me direz-vous, mais il y a quelques « trucs » que l’on peut appliquer.
Par exemple, ne pas s’occuper des affaires des autres et ne pas se comparer. Il y aura toujours meilleurs et aussi toujours moins bon.
`Se réjouir du bonheur d’autrui ou de sa réussite. C’est simple et même si au début cela est forcé, vous verrez que l’énergie qui rayonnera de vous sera bien différente de celle de l’envie.
Il y a encore un point qui doit attirer notre attention pour se garder en santé. Ne pas faire de travaux fatigants et inutiles. Cette traduction d’un texte qui a été rédigé avant notre ère a de quoi nous interpeller. Des travaux fatigants et inutiles. Il faut que les deux conditions soient réunies. On peut faire un travail fatigant si au bout, il a une nécessité pour soi et les autres. On ne peut pas faire ce même travail s’il est inutile. L’inutilité d’une action, d’un travail, affaiblit vos reins et votre coeur (d’un point de vue énergétique).
Imaginez la scène suivante: il y a une inondation et en pleine nuit vous aidez toutes les personnes en danger et vous faites des navettes incessantes, levez, nettoyez. Au matin vous êtes harassé par ce travail fatigant mais il a nourri votre coeur d’avoir fait une action humaniste. Vous avez sauvé des personnes.
Maintenant, autre exemple: votre travail est de nuit à encapsuler des bouteilles de bière. Le travail est fatigant et si au début vous l’avez peut-être trouvé utile, je suis convaincu qu’au fil du temps vous n‘y voyez plus qu’absurdité. Il devient un travail appelé alimentaire mais qui, s’il persiste, pourra être à l’origine de maladies.
Autre point soulevé par les penseurs: nous devons manger en fonction des saisons. Chaque saison est une dose de lumière et produit des aliments de la terre qui sont liés à cet ensoleillement. Il est important de manger en fonction des saisons, donc, mais aussi en fonction du terroir. Il est terrible par exemple de manger des bananes toute l’année. Quel arbre pourrait produire toute l’année des fruits? Rappel: notre maître est la nature, il faut donc la copier au plus près afin de nous entretenir dans cet éternel instant.
Enfin et pour clore la parole des anciens et leurs préceptes de vie, nous devons vivre en fonction de la lumière du soleil.
Au printemps et en automne, il faut se lever tôt et se coucher tôt.
En été il faut se lever tôt et se coucher tard.
En hiver, il faut se lever tard et se coucher tôt.
C’est par cette alternance du temps et de notre ensoleillement que nous entretenons notre vie. Nous sommes des êtres de lumière. Il faut bien comprendre que nous faisons partie d’une chaîne de vie. Le monde végétal transforme, par la photosynthèse, la lumière en oxygène que nous respirons. Nous inspirons donc de la lumière transformée pour nous par le monde végétal et si vous réfléchissez un peu, ce n’est pas pour rien que nous sommes une sorte de fractale du monde végétal. Nous avons des arbres bronchiques, rénaux et bien d’autres encore comme l’arbre du cervelet (voir une coupe de celui-ci). Le monde végétal transforme la lumière en oxygène. Les humains transforment l’oxygène en lumière. Ce n’est qu’un champ électromagnétique mais ceci est une autre histoire.
En conclusion, voici quelques principes à appliquer dans son quotidien. Il ne faut pas oublier que nous sommes responsable de notre santé et ceci sur les trois plans physique, mental, social.
manger régulièrement et si possible des produits le plus naturel possible, de son terroir et en fonction des saisons.
Se lever en fonction du soleil. Une bonne vie nocturne doit nous permettre de nous réveiller sans réveil mais simplement par la lumière du jour qui commence à poindre. Nous ne devons pas veiller tardivement et surtout ne pas avoir un cycle régulier annuel ce qui est perturbant pour l’organisme car alors il ne s’adapte plus et dans ces conditions, ralentit son métabolisme, stagne et peut entrainer des pathologies.
Ne pas succomber à nos désirs. Apprécions ce que nous possédons. Soyons heureux de cela. Une histoire chinoise dit ceci: « celui qui possède un beau vase, ne dort plus ». Trop avoir attire les jalousies. Il vaut mieux avoir ce qui est nécessaire et vivre en harmonie avec son prochain.
Ne pas faire de travaux fatigants et inutiles. Toute action doit être projetée vers l’accomplissement, l’amélioration de soi et des autres et le travail doit rester dans des strictes bornes où il ne nous épuise pas. C’est un gage de bonne santé morale et physique.
Faire les choses en plénitude. Un proverbe japonais dit ceci: « lorsque je bois du thé, je bois du thé. Combien d’années il m’a fallu pour en arriver là ». Nous devons nous y atteler dès maintenant, en vivant cet éphémère éternel instant.
C’est en s’appliquant tranquillement, sans excès à ces règles de vie, que le corps, en remerciement, se fera silencieux.
Jean Motte
Acupuncteur
Directeur centre Imhotep
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